perdu sur le chemin de la sortie

Le soleil était haut dans le ciel, les nuages se déplaçaient paresseusement, les oiseaux chantaient, le clapotis de l’eau sonnait comme une douce mélodie et les animaux venaient faire le plein de caresses au près des voyageurs… Enfin c’est ce qu’aurait bien voulu raconter Lenwë sur le début de son périple…

En réalité le jeune homme marchait depuis le petit matin, il s’était engouffré dans la forêt alors que le soleil s’élevait encore vers son zénith. Après un arrêt pour assouvir ses besoins naturels, et deux (ou peut être trois..) arrêts pour extraire les cailloux de ses sandales, Lenwë s’était remis en route, suivant le fin chemin de terre battue a peine perceptible puisque les arbres semblaient avoir décider que leurs feuilles étaient beaucoup mieux sur le dit chemin que sur leurs longues et hautes branches qui tentaient Désespérément de capter le soleil.

Car depuis quelques heures, le paysage parsemé de taches de lumières était devenu sombre, le dôme d’arbre absorbant toute la lumière pour ne rediffuser qu’une clarté tamisée aux voyageurs de passage. De plus tous ces arbres se ressemblaient, la même mousse, ce même blanc immaculé…Petit Elanessë avait pour habitude de contempler cette étrange forêt en mâchouillant un morceau de pain aux amandes, ce demandant ce que cette barrière blanche pouvait bien cacher de ci précieux pour qu’elle ai pris cette couleur.

*et voilà…C’était couru d’avance : je me suis perdu…*

Car si le jeune homme était doué en musique et en stratégie, il était totalement dépourvu d’un quelconque sens de l’orientation, il marchait donc sans savoir qu’il allait à la perpendiculaire de l’endroit où il voulait se rendre, à savoir la sortie de la forêt. Il effleura sa bourse à l’embonpoint alléchant, cependant ses réserves d’argent ne tiendraient pas indéfiniment, il fallait qu’il trouve vite un village… Ou alors une caravane en voyage sur cette route.

Tout en marchant, ne se souciant plus vraiment du fait qu’il soit perdu, Lenwë observait sereinement le paysage. Tient… Un écureuil s’était aventuré à ses côtés, peut être a la recherche de noisettes ou nouveaux mets à donner à sa famille ? Un joli petit écureuil au panache roux flamboyant et aux oreilles poilues. La dague du musicien le titillait fortement… S’était bon l’écureuil flambé ? Et oui il remettait ça… A chaque fois qu’il rencontrait un animal il avait envie de lui planter un hachoir entre les deux yeux. Personne ne savait vraiment d’où lui venait cette haine des animaux, lui qui était d’habitude si gentil. Il était d’ailleurs l’auteur de ‘ne montez pas vos chevaux, mangez les’ et de ‘les chats ne servent a rien faites en des tapis !’ deux chansonnettes peut appréciées des habitants des villages sauf des grosses brutes ou des soldats de passage. Evidemment les gens aimaient qu’on leur raconte des histoires de belles princesses, ou de pauvres paysans devenant riches.

Marchant en évitant de regarder l’animal pour ne pas commettre de meurtre et surtout ne pas gâter la beauté surréaliste de cette forêt blanche, il se mis à chantonner un air plutôt connu dans la région : le fantôme de Nebula… Une histoire contant la découverte d’un fantôme dans la fameuse capitale, s’était une princesse qui cherchait à rejoindre le monde des morts, mais Devon cherchait à obtenir son âme pour l’enfermer dans l’île des âmes perdues. Devon… s’était un sujet tabou dans ce monde de peur, seul quelques bardes osaient encore pousser la chansonnette avec ce conte. Mais chanter, bien qu’il ai une jolie voix, n’était pas vraiment la chose à faire en ce moment : il aurait mieux fait de chercher un moyen de se sortir du pétrin dans lequel il s’était fourrer : comment sortir de cette forêt, en entier, et du bon côté ?

Lenwë s’arrêta de chanter : une autre mélodie parvenait à ses oreilles : celle d’un ruisseau suivant son cour, guidé par le bruit de l’eau le musicien se fraya un passage parmi les branches, les buissons et les ronces. Il grimaça lorsqu’une des épines mordis profondément la chair, pourtant il poursuivi son chemin pour tomber sur un petit ruisseau se jetant dans un minuscule étang. Enfin assez grand pour faire des réserves d’eau ou se baigner. Voilà un bien jolie coin pour casser la croûte et sortir sa Lyre ma foi… Ce fut donc sur un rocher humide que Lenwë posa son délicat postérieur, en s’évertuant à essayer de sortir l’épine de son bras droit… Chose bien peu facile lorsqu’on est droitier..

Kelyann, après quelques jours de marche dans Myzteria, était arrivée près de la Forêt Blanche. Elle s'arrêta un instant, admirant la beauté de la nature:

" Ca fait tellement longtemps que je n'ai pas vu d'aussi grands arbres...Pour une personne qui maîtrise l'élément Terre, c'est un comble, hein Kaïwen? "

La jeune fille avait dit ça avec un sourire sur le visage, heureuse de trouver une forêt après tant de jours passés dans les multiples villages. Elle savait que le tigre ne comprenait pas un traître mot de ce qu'elle pouvait raconter, mais elle aimait penser qu'il l'écoutait quand même. Ainsi elle lui parlait souvent lorsqu'il n'y avait personne , aussi bien pour se confier que pour dire ce qui lui passait par la tête.

Les deux compagnons s'engouffrèrent alors dans la forêt où les feuilles des branches ne laissaient passer que des filets de lumières, ce qui rendait l'endroit encore plus féerique qu'il ne l'était.
Kelyann marchait lentement, admirant la nature qui se déployait autour d'elle. Kaïwen la suivait, s'éloignant de temps en temps pour traquer quelque petit animal faisant office de casse-croûte.

Un chant mélodieux la fit soudain sortir de ses rêveries. Un jeune homme était en train de chanter, non loin de là. Elle fit un signe à Kaïwen, qui comprit tout de suite qu'il ne devait faire aucun bruit. La jeune enchanteresse s'avança furtivement, apercevant l'homme qui s'était interrompu. Il se dirigeait vers un ruisseau dont on entendait couler l'eau.
Kelyann le suivit, c'était plus fort qu'elle, avancer sans faire de bruit, comme elle l'avait appris grâce à son fidèle félin, lui procurait des sensations étranges qu'elle adorait. En plus, elle avait enlevé ses sandales, et elle aimait ressentir le contact des feuilles et des plantes humides sous ses pieds.
Kaïwen, qui s'était absenté, ressurgit, poussant des gémissements plaintifs. Kelyann regarda alors l'objet de son malheur: il s'était planté une épine de porc-épic dans la patte gauche. L'enchanteresse s'assit alors en tailleur, pour arriver à hauteur de la patte du tigre et lui retira délicatement l'épine. Elle sortit une mixture de sa besace qu'elle appliqua sur la plaie. Ce mélange la ferait cicatriser et atténuerait la douleur. Le tigre baissa alors la tête en signe de remerciement et la jeune fille le caressa avec une tendresse infinie.
Elle avait rencontré le jeune tigre en le soignant, comme elle venait de le faire. Il l'avait suivi et était devenu son compagnon, son confident, son meilleur ami. Depuis, elle ne parcourait les chemins qu'avec lui, et n'avait rencontré personne d'intéressant jusque là.
Elle repensa au jeune homme.

*Après tout, il faudrait peut-être que je m'intéresse aux autres...Et puis un peu d'eau nous fera du bien, je remplirais ma gourde.*

Sur ces pensées, Kelyann se releva, suivie de près par son ami, et elle se dirigea sans plus de discrétion vers le ruisseau. Arrivée là-bas, elle vit l'homme de plus près. Il avait de longs cheveux gris mêlés de blanc et la peau très pâle. Aucun bâton à ses côtés, il ne s'agissait certainement pas d'un enchanteur, ou alors il était en passe de le devenir.
Elle l'observa et le vit qui s'affairer à retirer quelque chose de son bras droit.

*C'est pas vrai...Lui aussi il aime les porc-épics?*

Elle s'approcha doucement de lui, Kaïwen à ses côtés et lui dit d'une voix enjouée:

" Bonjour! Vous avez besoin d'aide?" ...

Lenwë était en train de…de se mordre le bras ?! Et oui, sa main droite n’étant absolument pas qualifiée pour un tel exercice (et oui il n’est pas contorsionniste) il s’acharnait avec les dents lorsqu’une apparition des plus inattendues s’offris a ses yeux. Et oui, un être humain venait de faire son entrée dans la petite clairière au ruisseau. Dans la clarté blanchâtre des lieux la jeune fille qui venait d’arriver avait des apparences d’ange, Lenwë n’aurait pas été étonné si des ailes étaient apparues dans le dos de la demoiselle. Plus petite que lui, des cheveux noirs aux reflets bleus, de jolis yeux bleus gris et un corps svelte enfermé dans une mince tunique blanche : elle était jolie, on aurait dit une de ces prêtresse sortie des contes qu’aimait narrer le jeune barde.

Il la gratifia d’un joli sourire et ses yeux descendirent peu à peu vers le ‘truc’ aux pieds de l’apparition. Une chose énormes aux yeux du jeune garçon qui jusque là n’avait eu pour compagnie animale supportable que des moutons et chiens de berger, allant de temps à autres aux poney. C’était gros, plein de poils, des yeux jaunes comme ceux des chats du village. Un pelage blanc et jaune, des énormes muscles et pourtant une facilité de déplacement gracieuse. Les yeux violets du garçon descendirent encore, il retint un sursaut en voyant les griffes pointues de l’animal. Ce gros chat ressemblait à un dessin d’un des recueils de sa maison…Un tigre, enfin quelque chose dans ce genre…

Essayant d’ignorer comme il pouvait la présence d’une bestiole aussi dangereuse dans sa classification des dangerosités de l’espèce animale, le regard de Lenwë retourna à la jeune fille qui était visiblement un peu plus jeune que lui, mais de peu. L’éclat du diamant, qui réfléchissait alors un rayon de soleil qui avait réussis à se faufiler entre les feuilles, attira le jeune homme.

*Une magicienne ?*

Malgré les nombreuses histoires qu’il avait apprises par cœur, Lenwë avait toujours du mal avec le terme ‘enchanteur’ et ‘enchanteresse’, pour lui dire magicien revenait au même et s’était plus facile à retenir. Une feuille d’un blanc pur vint voleter entre les deux jeunes gens avant de se poser paresseusement sur la surface du sol, une minuscule fourmi, accompagnée d’un de ses commandos spéciaux, l’attaqua de suite, grignotant les extrémités de la parcelle de feuille qu’elle voulait emporter. La voix de l’enchanteresse coupa les réflexions du musicien.

" Bonjour! Vous avez besoin d'aide?"

Une apparition fortuite mais agréable, et en plus utile ! Les ‘magiciens’ avaient toujours un tas de trucs dans leurs sacs de voyage. Elle aurait sûrement une petite pince ou un truc dans le genre. Lenwë hocha la tête avec une légère grimace en bougeant son bras, il faut dire que l’aiguille, plutôt grosse, s’était positionnée juste sous le poignet, et si elle était allée se planter dans la partie arrière basse de l’anatomie du garçon, cela aurait été certes plus gênant mais tout aussi douloureux. Et ses frères lui avaient souvent raconté des histoires d’infections horribles où il fallait couper le bras ! Et le jeune barde avait besoin de ses deux mains…

« Effectivement douce demoiselle, votre venue, bien qu’inattendue, est forte heureuse et est la bienvenue ! Tout autant que votre bien délicate interrogation à l’égard de mes problèmes. Voyez vous, je me suis malheureusement fourvoyé dans ce bien joli dédale d’arbres et en essayant de rejoindre ce ruisseau je me suis pris dans un buisson de ronces… »

Le garçon haussa les épaules d’un air faussement triste comme pour bien appuyer le fait que s’était un imbécile fini pour s’être aventurer dans ce labyrinthe de feuilles et de mats blancs sans avoir pris la peine de consulter la moindre carte.